L’Union européenne est-elle compatible avec le progrès social ?

Le progrès social n’a jamais été le moteur de la construction européenne, lequel a toujours relevé de considérations économiques et géopolitiques, même si à l’origine il faisait partie de ses objectifs. Mais nous étions alors dans une autre période (fordisme des 30 Glorieuses) avec un autre rapport de force capital/travail.

Depuis longtemps toutefois, il n’était plus qu’un thème plus ou moins obligé des discours et s’inscrivait de plus en plus en contradiction avec la logique économique et financière de l’Union européenne. L’Acte unique (1986) a constitué à cet égard une étape importante – plus une clarification qu’une rupture – en phase avec la généralisation de l’offensive néolibérale, même si son initiateur (Jacques Delors) a cherché à obtenir la caution des syndicats en multipliant les instances de dialogue social. Mais les arrêts de la CJUE (Cour de justice de l’Union européenne) ont rapidement dissipé les illusions (pour ceux qui en avait encore) en rappelant qu’en vertu des traités, les libertés économiques et le droit de la concurrence primaient sur les droits des travailleurs.

La crise de 2008 a accéléré cette évolution. La prenant pour prétexte (stratégie du choc), les dirigeants européens, épousant les demandes des marchés financiers et du patronat, ont décidé d’accentuer l’offensive et de ne plus s’embarrasser de faux-semblants. Les réformes mises en place au nom de l’amélioration de la gouvernance (Paquets législatifs Six-Pack en 2012 et Two-Pack en 2013, TSCG – Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance de l’UE, appelé aussi Pacte budgétaire – en 2012,...), qui renforcent notamment les compétences de la Commission européenne et les élargissent au domaine social jusqu’alors prérogative nationale, visent explicitement le démantèlement de l’État social et de tout ce qui permettrait aux travailleurs de s’y opposer.

En Grèce comme dans tous les pays qui ont sollicité l’aide financière de l’Union, les salaires, la protection sociale (retraites) et le droit du travail (dénonciation des conventions collectives) ont été en première ligne des exigences imposées par les créanciers. Et ces thèmes figurent bien évidemment au cœur des réformes exigées par l’Eurogroupe dans l’accord imposé au gouvernement grec. Même si la pression est moins forte et moins directement exécutoire, elle s’exerce aussi sur les autres pays membres à travers les recommandations (assorties de possibilités de sanctions) de la Commission européenne. La loi Macron en est une des traductions en France. Confiant dans la force de ce rouleau compresseur libéral, dans lequel son institution joue un rôle éminent, le président de la BCE, Mario Draghi, a d’ailleurs annoncé, lors d’un précédent épisode de la « crise grecque » en 2012, que le modèle social européen était mort.

Au vu de ces évolutions institutionnelles et de la logique qui les sous-tend, il est clair désormais que le progrès social n’est plus compatible avec l’Union européenne telle que nous la connaissons aujourd’hui.

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