L’Union européenne est-elle compatible avec la démocratie ?

Là aussi cela vient de loin mais le mouvement s’est accéléré sur la dernière période. Depuis ses origines, la construction européenne a été marquée par un déficit démocratique régulièrement dénoncé et que l’élargissement progressif des pouvoirs du Parlement européen n’est jamais parvenu à combler. Cela constituait même une marque de fabrique de la méthode européenne. L’Europe s’est construite sans les peuples dont les élites européistes se méfiaient des humeurs erratiques néfastes à la continuité de leur projet et dont elles craignaient surtout qu’ils ne saisissent que trop bien les enjeux réels de celui-ci derrière le récit mythique qui leur était servi.

Cette méfiance à l’égard de l’expression populaire n’était pas sans fondement puisqu’à plusieurs reprises, lorsqu’ils ont été consultés, les citoyens de plusieurs pays ont marqué leur refus des propositions qui leur étaient faites, obligeant les dirigeants à de délicates acrobaties institutionnelles et à de grossières pressions pour qu’ils finissent par voter « correctement ». Quelle perte de temps et d’énergie ! C’est d’ailleurs pour ne plus s’exposer à de telles déconvenues que les gouvernements avaient convenu entre eux de ne pas recourir au référendum (sauf dans les pays où cette procédure est obligatoire) pour la ratification du traité de Lisbonne.

Depuis la crise, l’amplification de l’offensive libérale a conduit les dirigeants européens à modifier l’architecture institutionnelle afin de se soustraire toujours plus aux « contraintes » démocratiques. Demander aux peuples de soutenir les attaques portées contre eux devenait en effet de plus en plus risqué. Même le Parlement européen a été écarté de certains processus de décision en faisant du TSCG un simple traité intergouvernemental et non pas un traité européen. Ces nouvelles règles, alliant le libéralisme anglo-saxon à l’ordolibéralisme allemand, ont favorisé l’émergence d’un fédéralisme technocratique dont la Troïka est l’expression la plus emblématique.

Si les rituels électoraux ne peuvent bien sûr pas être supprimés (jusqu’à quand ?…), ils doivent désormais n’avoir aucune conséquence sur les politiques menées, le mieux étant que celles-ci soient confiées à des gouvernements de technocrates agissant sous contrôle de leurs homologues européens.

C’est d’ailleurs ce qui a été imposé à deux reprises, à l’Italie avec Mario Monti (ancien commissaire européen) et à la Grèce avec Lucas Papademos (ancien responsable de la BCE), et c’est ce que le président du Parlement européen a proposé récemment pour remplacer le gouvernement Tsipras. Car, comme l’a exprimé Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, « Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens ». Et si certains peuples résistent et s’obstinent à vouloir mettre en œuvre leurs propres choix, ils seront mis sous tutelle. C’est ce qui arrive au peuple grec.

L’Europe n’est plus seulement une construction institutionnelle dont les peuples sont absents. Elle devient une machine de guerre contre eux, au service des financiers et des multinationales. Si les Grecs en font la dramatique expérience, tous les européens le vivent à des degrés divers.

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