Qui veut la peau du livret A ?

Le gouvernement a décidé d’abaisser à 1 % le taux des livrets A et des livrets de développement durable (détenus par 63 millions de foyers), le plus bas niveau de son histoire. Il prend ainsi le risque d’un mouvement de décollecte massif avec des conséquences en matière de financement du logement social et des collectivités locales. D’autant plus qu’aujourd’hui, plus de 40 % de la masse d’épargne collectée, soit 170 milliards d’euros, bénéficie aux banques privées sans contrôle ni contrepartie d’intérêt général.

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Un risque gravissime de décollecte

Vieux de près de 200 ans, le livret d’épargne n’est évidemment pas un produit financier comme un autre. Populaire, il est un facteur essentiel de cohésion sociale d’autant qu’une partie des sommes versées est centralisée et sécurisée à la Caisse des dépôts et investie dans des prêts à long terme (pouvant aller jusqu’à 60 ans !) pour financer des besoins d’investissement d’intérêt général (logements sociaux, collectivités locales, infrastructures et équipement du territoire....). La « manipulation » de son taux constitue nécessairement une décision politique. En diminuant la part des fonds centralisée à la Caisse des dépôts au profit des banques, en renonçant à la promesse de doublement du plafond du livret A et en baissant son taux de rémunération, le gouvernement porte gravement atteinte à la protection de l’épargne populaire et au financement des besoins d’intérêt général.

Quelles conséquences ?

L’argument utilisé pour baisser le taux du livret A consiste à dire que cette baisse entraîne mécaniquement une baisse des taux de prêt au logement social et indirectement des loyers. Certes, ces prêts consentis par la Caisse des dépôts sont « indexés » sur le taux du livret A. Mais, une baisse de 0,25 point lissée sur des durées de prêt supérieures à 30 ans n’a que peu d’effet sur le prêt et donc sur les loyers ! De plus, l’État a prélevé 10 milliards d’euros depuis 10 ans sur ces fonds au titre de la rémunération de sa garantie ! Autrement dit, il serait bien plus utile et efficace que l’État utilise cette somme pour « bonifier » les prêts au logement social.

A qui profite le crime ?

De fait, la « généralisation » de la distribution du livret A a permis aux banques de disposer « librement » de 170 milliards d’euros d’épargne populaire sans contrepartie. Il est fort probable que cette baisse de la collecte profitera principalement aux autres produits financiers plus rémunérateurs proposés par ces mêmes banques... Bingo encore pour elles qui pourront ainsi spéculer un peu plus sans nécessairement financer l’économie réelle. Ainsi, le dernier rapport de l’observatoire de l’épargne réglementée indique que les nouveaux prêts aux PME ont baissé de 3 milliards d’euros en 2013... Cette même année, les banques bénéficiaient pourtant d’un flux d’épargne populaire supplémentaires de plus de 40 milliards d’euros. Le Gouvernement donne votre argent aux banques plutôt que de financer des projets d’intérêt général avec. Mais, les banques lui disent merci !

Article paru dans notre journal n°29 (septembre 2014)

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